Entretien avec Valérie Satre, consultante indépendante spécialisée en Customer Marketing Insight, tendances et innovation
Propos recueillis par Christian Collot
Parcours et expertise
Q : Bonjour Valérie. Est-ce que tu peux te présenter, nous en dire plus sur ton parcours et la façon dont tu accompagnes les organisations autour de l’insight et des études dans leurs stratégies d’entreprise ?
Valérie Satre :
Bonjour, je m’appelle Valérie Satre. J’ai effectué ma carrière autour du monde de l’insight, de l’innovation et des tendances. J’ai d’abord exercé dans le conseil en études qualitatives et quantitatives, puis j’ai rejoint l’annonceur il y a un peu plus de 20 ans.
J’ai travaillé chez L’Oréal dans la recherche et l’innovation, en particulier sur les études exploratoires et l’évaluation du potentiel des innovations de rupture. Ensuite, j’ai rejoint le groupe SEB en région lyonnaise, il y a une quinzaine d’années, pour créer et diriger un département global regroupant foresight et prospective, études marketing, business analytics et social listening.
Depuis un peu plus de deux ans, je suis consultante indépendante. J’accompagne les marques dans l’optimisation et l’accélération de leur département Customer Marketing Insight afin de renforcer la consumer centricity et la connaissance des marchés.
L’évolution de la diffusion de l’insight
Q : Comment vois-tu aujourd’hui l’évolution de la diffusion de l’insight dans les organisations ? Est-ce que ça s’est amélioré ces dernières années ?
Valérie Satre :
Quand j’ai commencé, les enjeux étaient centrés sur la collecte et la méthodologie : obtenir de la donnée fiable était le nerf de la guerre. Aujourd’hui, la situation a radicalement changé. Nous faisons face à une infobésité : le vrai enjeu n’est plus la collecte, mais ce qui l’entoure.
Il s’agit de challenger la demande : est-ce que la donnée est utile ? Est-elle déjà disponible ailleurs ? Quel ROI apportera-t-elle ? Ensuite, il faut se concentrer sur la valorisation de cette donnée dans le temps, sa convergence avec d’autres sources et son exploitation durable pour différents interlocuteurs dans l’entreprise.
L’insight et la décision business
Q : Le département études doit se rapprocher du business et du ROI. Quel est ton regard sur ce point ?
Valérie Satre :
Aujourd’hui, les équipes études sont challengées pour devenir de vrais business partners. On leur demande d’adopter la temporalité et les codes des équipes business : réactivité, KPI, performance, ROI.
Même si certaines équipes restent encore perçues comme « à côté », la tendance est à l’intégration. L’insight doit démontrer sa valeur en contribuant aux décisions commerciales et en renforçant la perception d’une entreprise réellement consumer centric. J’ai eu l’occasion de le voir chez Sephora : affirmer son leadership passe aussi par la capacité à prouver que l’on connaît ses clients et que l’on les écoute en permanence.
Vers une hybridation des données
Q : Tu évoques souvent l’hybridation des données. Est-ce pour toi un enjeu clé ?
Valérie Satre :
Oui, mais il faut distinguer les niveaux. L’hybridation quali/quanti est déjà bien établie. Le vrai challenge, c’est de croiser les données d’insight avec d’autres sources comme le CRM ou le social listening. Cela demande de sortir du travail en silos pour parvenir à une vision globale et prédictive du consommateur.
Aujourd’hui, c’est encore complexe et réservé aux grands groupes, mais l’IA va accélérer cette transformation.
Fidélisation, acquisition et engagement
Q : Le coût d’acquisition client augmente. Pour toi, le capital client est-il la mine d’or de demain ?
Valérie Satre :
Je pense que le vrai enjeu, c’est l’engagement. Plus que la simple fidélité, c’est la capacité d’une marque à rester désirable, à générer de l’émotion et à cultiver une relation sincère avec ses clients. C’est cela qui crée de la valeur et construit la confiance à long terme.
En conclusion
Q : Si tu devais donner un conseil aux entreprises ?
Valérie Satre :
Travailler profondément ses insights pour cultiver l’engagement des cibles. Cela passe aussi par l’identification et le traitement des irritants, car un détail mal géré peut fragiliser toute la relation client. L’avenir de l’insight, c’est l’engagement durable et la co-création avec les consommateurs.